CATALOGUES NUMERO 21 – SEPTEMBRE 2010 CLOU MAGAZINE PEUGEOT 305 TRABANT

CLOU – MAGAZINE

NUMERO 21 – SEPTEMBRE 2010
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AVENTURES SUR QUATRE ROUES

Cette rubrique "Aventures sur Quatre Roues" vous est ouverte (les autres aussi d’ailleurs…). Si vous avez vécu une aventure liée à l’automobile, amusante, cocasse, ou instructive, que vous aimeriez la faire partager et, ô comble de bonheur, que vous pouvez l’illustrer par des photos (Bon, si vous n’en avez pas, mais que le texte est bien, on se débrouillera)… alors vous pourrez être le héros d’Aventures sur Quatre Roues. Toute proposition peut être envoyée à l’adresse e-mail en bas de page… et le comité de rédaction statuera souverainement sur la publication dans ces pages.

Pour débuter, je vais m’y coller.J’espère que cela vous amusera et vous inspirera, carj’aimerais bien que cette rubrique soit la plus fournie de Clou-Magazine !

WEEK-END A BERLIN EN PEUGEOT 305 BREAK
ou "Barbapoux Saison 2"

Après avoir relaté en juillet dernier un épique déménagement en compagnie d’un charmant personnage surnommé Barbapoux,j’ai le plaisir de vous informer que celui-ci n’avait pas disparu depuis. A intervalles réguliers au cours des années 90, nos routes se sont croisées, et je vais vous raconter une nouvelle aventure. Le véhicule utilisé était cette fois une Peugeot 305 break datant d?une bonne dizaine d?années, mais déjà fort fatiguée et d?une propreté globalement douteuse.
Barbapoux passant le plus clair de son temps à récupérer toutes les cochonneries qui traînaient au bord des routes (meubles, morceaux de ferraille?), la banquette arrière avait disparu pour augmenter l?espace de chargement.

Alors pourquoi ce voyage à Berlin ?
Bien que ne parlant que quelques mots d?Allemand (et pas toujours les bons), Barbapoux passait chaque année quelques jours en Teutonie, quelques semaines avant la saison des fêtes, pour y vendre des boules de gui.

En effet, un certain nombre d?allemands respectent encore la tradition qui consiste à s?embrasser sous le gui, la nuit du nouvel an. Par ailleurs, en France, des millions de boules de gui encombrent les arbres dans nos campagnes, en pure perte. Donc Barbapoux avait décidé de réunir les données du problème : muni d?un sécateur et juché sur le toit de son véhicule, il coupait le gui qui poussait à sa portée au bord des routes, à la manière des druides gaulois. Il en remplissait ensuite l?arrière du break ou de la fourgonnette, et allait vendre le produit de sa cueillette aux jardineries? qui refusaient en général la moitié de la récolte, trop abîmée par le voyage, et offraient pour le reste quelques dizaines de Deutsche Mark qui payaient l?essence et quelques menus frais. Pour ceux qui ne connaissent pas le gui, disons que cette plante, parasite, qui pousse en « boules » très caractéristiques, produit une baie incroyablement collante quand elle s?écrase, rendant le nettoyage particulièrement pénible.

A l?occasion de ces voyages, au début des années 90, peu après la chute du mur, Barbapoux avait découvert les Trabant, délicieux véhicules constitués d?assemblage de plastique et de carton appelé Duroplast, qu?un pétaradant moteur deux temps propulsait à une allure d?escargot anémique en diffusant une fumée bleue aux relents d?huile chaude. Bien évidemment, notre ami était tombé immédiatement amoureux de ces engins, d?autant qu?ils étaient quasiment disponibles gratuitement.

Une boule de gui… la fortune à portée de main.  

Lors d?un voyage précédent, une Trabant avait été rapatriée, et logiquement, était tombée en panne dans les trois jours, le temps de s?apercevoir qu?aucune pièce détachée n?était disponible dans notre pays.

Donc l?expédition avait pour but de découvrir une mythique « casse de Trabant », et de ramener des éléments de moteur et de carrosserie pour restaurer son modèle prévenir de nouvelles pannes.

Le gros avantage des autoroutes allemandes est leur gratuité. De plus, la vitesse est libre sur bon nombre de tronçons, mais la 305 ne plafonnait qu?à 120 km/h environ, une vitesse estimée en l?absence de tout compteur de vitesse et de kilométrage? donc nous occupions la voie dévolue aux poids-lourds et autres objets encombrants.

Après quelques centaines de kilomètres, la tenue de route, déjà approximative, commençait à devenir nettement intenable malgré une route bien droite et dégagée. Un arrêt sur le bas-côté nous dévoila la cause : un pneu avant quasiment à plat. Barbapoux se saisit d?une des trois roues qui traînaient à l?arrière : la première provenait d?un autre modèle, la seconde comportait une sérieuse hernie latérale, la troisième s?avérait convenir? Mais une fois installée, nous dûmes constater qu?elle n?était guère gonflée, et que la conduite restait hasardeuse.

A vitesse réduite, nous abordâmes une station-service, où toutes les roues furent regonflées (en fait, elles en avaient toutes besoin).
Mais après quelques minutes de conduite, nous devions nous rendre à l?évidence, la roue que nous avions changée perdait sa pression d?air.
Barbapoux se souvint qu?il l?avait déjà retirée pour la remplacer suite à une précédente crevaison, mais effectivement en remettant à plus tard le soin de la gonfler.
Un arrêt sur un refuge en bordure d?autoroute nous confirma que le pneu était aussi plat que le précédent.
Quand une telle chose arrive, de nos jours, on se fait dépanner, et la station-service la plus proche échange le pneu contre un neuf. Mais Barbapoux ne l?entendait pas ainsi, cette opération étant selon son échelle de valeurs une « arnaque ».
Donc le problème fut réglé à l?ancienne : démontage du pneu, examen de la chambre à air (Eh oui, il y en avait une !) pour y mettre une rustine.
Néanmoins, après dix minutes d?effort, quand je découvris que la chambre à air était déjà constellée de rustines, je perdis patience.
« Si tu ne veux pas faire réparer, au moins change cette chambre à air !. Je te l?offre. Je t?en offre même deux ! »
Une Trabant bardée de chromes et d’accessoires. Le
grand luxe en 1980, une poubelle dix ans plus tard…
 

Une fourgonnette de l?ADAC vint nous voir pour nous proposer de l?aide. Nous déclinâmes l?offre de dépannage, mais la roue fut regonflée, et le dépanneur nous indiqua la direction du garage le plus proche. Celui-ci nous vendit deux chambres à air, et poussa même l?amabilité à nous les mettre en place gratuitement sur les deux roues avant.
La route put donc reprendre, la nuit étant entre temps tombée et le froid devenant de plus en plus perçant. Nous étions en janvier et la 305 n?était pas totalement étanche.

A un moment donné, alors que nous étions déjà dans l?ex-Allemagne de l?Est, une forme sombre sur le bas-côté n?attirait pas l?attention, mais Barbapoux pila comme un forcené, me tirant de ma somnolence. Il recula pour ce mettre à la hauteur de la voiture, une vieille Volkswagen Jetta aux vitres totalement embuées.
« Je suis sûr qu?ils sont accidentés ou en panne ! Nous devons les aider !
– Tu t?arrêtes toujours quand tu vois une voiture sur le côté ?
– Toujours ! C?est comme ça que je fais les rencontres les plus intéressantes ! »
Effectivement, la VW était occupée par des jeunes un peu baba, et franchement fauchés, qui allaient rejoindre leur squat à Berlin, et qui étaient tout simplement en panne d?essence.
En Allemagne de l?Est, il était interdit de tomber en panne d?essence, paraît-il, et ils risquaient une amende. C?est la raison pour laquelle ils n?avaient pas mis les warnings ni n?avaient téléphoné aux bornes de secours ! Le froid étant intenable, ils s?étaient entassés et couverts de tout ce qu?ils avaient trouvé, pour passer la nuit au mieux.
Barbapoux évalua la situation et proposa de les remorquer jusqu?à la station suivante. Cette proposition fut acceptée. Barbapoux chercha dans son coffre sa chaîne, avant de s?apercevoir qu?il l?avait oubliée ou rangée ailleurs. Mais, pas démonté pour si peu, il brandit une pelote de ficelle. « Nous allons utiliser ça. Je l?ai déjà fait, ça marche très bien ! ».
Le jeune conducteur afficha un certain scepticisme, mais n?ayant pas d?autre solution, la Jetta fut attachée au crochet d?attelage de la 305. Les deux jeunes filles qui l?accompagnaient montèrent avec nous pour gagner un peu de chaleur à défaut de confort (Il n?y avait pas de banquette, donc il fallait s?asseoir sur les roues de secours au milieu du bric-à-brac dans une totale obscurité, pour donner l?ambiance).
L?attelage démarra à vitesse réduite, les warnings de la Jetta protégeant l?ensemble. On sentait par moment la ficelle se tendre, ce qui occasionnait un petit choc sourd, avant de reprendre un peu de mou avant une nouvelle tension.

Soudain, la 305 prit un peu de vitesse et les chocs cessèrent.
« On a trouvé le bon rythme, triompha Barbapoux. On ne sent plus le poids !
– Regarde un peu derrière ! »

Les warnings de la Jetta s?estompaient peu à peu dans le brouillard, pendant que le conducteur agitait le bras et que ses cris étaient couverts par le ronflement de notre moteur.

Quelques minutes après, et avec un peu plus d?épaisseur de ficelle, les deux véhicules furent à nouveau liés, avant de faire une entrée triomphale sous les projecteurs de la station-service quelques kilomètres plus loin.

Les jeunes baba nous proposèrent de terminer la nuit dans leur squat berlinois. Il nous suffisait de les suivre. La Jetta, une fois le plein fait, avait retrouvé une étonnante vivacité, et notre poussif engin peinait à suivre le rythme sur les pavés de la grande ville qui s?éveillait.
Notre état de fatigue était tel que nous n?avons pas poussé très loin l?examen de notre couchage : un amoncellement de couvertures et de couettes, sur des matelas à même le sol, nous accueillirent sans protocole.
Quelques heures plus tard, un café artisanal et macrobiotique nous fut offert, et en avoir avalé une gorgée, il devenait évident que nous n?allions pas abuser longtemps de cette hospitalité pourtant fort généreusement offerte.

Et voici la fameuse 305… C’est incroyable comme elle 
a l’air propre, vue de loin.
 
Et commença la chasse à la mystérieuse « casse des Trabant » qui n?existe pas plus que le cimetière des éléphants. Cette quête nous mena dans différents marchés aux puces berlinois, dont le plus célèbre, celui situé sur l?ancien emplacement du Mur, voyait vendre sous le manteau, parait-il, les anciens armements détournés des stocks militaires des différents pays frères. Nous n?avons rien trouvé de tel, à notre grand regret, mais Barbapoux dénicha à un prix modique une paire de jumelles à infra-rouges. Cet engin, testé le soir même avec des piles de récupération, s?avéra assez peu pratique, mais il faut reconnaître que ça peut quand même impressionner la galerie. D?autres achats indispensables (des livres sur l?industrie automobile locale, une chapka, des instruments de mesure chinois?) nous permirent d?écouler quelques Deutschemark supplémentaires.

En fin de journée, dans le dernier marché aux puces visité, une remorque débordant de roues de Trabant était ornée d?un panneau « A emporter ». J?indiquais à Barbapoux l?aubaine, et celui-ci parvenait à peine à y croire. La remorque avait été abandonnée par son propriétaire, et les brocanteurs des stands voisins nous invitaient à débarrasser le terrain de ce stock de roues.

Il s?avérait que la plupart des roues étaient voilées, pneus fatigués, jantes cornées? aussi fut-il nécessaire de faire un tri pour garder les quatre plus belles. La remorque fut vidée, les choix fait, puis nous remîmes les autres en place.
Saisi d?un regret, Barbapoux revint en prendre quatre autres de second choix, « au cas où ». Nous allions quitter l?endroit quand il me dit :
« Il reste de la place dans le coffre, et on ne retrouvera pas une telle opportunité. »

Bref, nous avons chargé la totalité des roues, ce qui a contribué à modifier radicalement les performances de la Peugeot au retour.

Cette dernière, contre toute attente, supporta bien le voyage et sera disponible pour d?autres aventures.

Quant à la Trabant, je ne l?ai jamais vue rouler.

Et si certains d?entre vous veulent des jantes de Trabant tordues et rouillées, contactez-moi, je passerai le message.

Laurent Bunnik

 

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